La pollution lumineuse – qu’est-ce que c’est ?

Lorsqu’on nous parle de pollution, nous pensons d’abord à la pollution de l’air ou à celle des océans (de l’eau) ; rarement à la pollution lumineuse. Pourquoi ? Peut-être parce que nous la connaissons mal et que nous l’estimons, à priori, peu néfaste pour notre santé, notre environnement ou notre cadre de vie ? C’est faux ! Des études scientifiques désormais de plus en plus nombreuses démontrent que la pollution lumineuse a un impact certain sur nos rythmes biologiques comme sur ceux des animaux, pouvant affecter notre santé (ex. troubles du sommeil). Mais qu’est-ce “la pollution lumineuse” ?

La pollution lumineuse est un excès nocturne (3) de production lumineuse en milieu ouvert, d’origine humaine, conduisant à dégrader la perception de l’environnement.

Selon l’Union Astronomique Internationale, il y a pollution lumineuse lorsque la lumière artificielle propagée dans le ciel nocturne est supérieure à 10% de sa luminosité naturelle, la nuit. En 2001, une étude publiée par la Royal Astronomical Society (Londres), estimait que la pollution lumineuse impactait 19% des terres émergées, 62% de la surface des Etats-Unis et 85% de la surface de l’Union Européenne (1 et 1a).

Qui sont les grands contributeurs de la pollution lumineuse ?

Principalement concentrés dans les zones urbaines et péri-urbaines, ils sont directement liés à nos modes de vie. Ce sont tous ces éclairages artificiels qui fonctionnent en abondance comme les enseignes publicitaires, les vitrines de magasins, les éclairages urbains, les bureaux éclairés la nuit, les spots sensibles aux mouvements placés aux abords des jardins, des maisons, des entrepôts, les stades de foot, les aéroports, …

Cette accumulation de sources d’éclairages artificiels publics ou privés, trop puissants, trop nombreux, mal conçus ou mal orientés provoquent de la pollution lumineuse qui forme au-dessus des agglomérations des sortes de dômes orangés, des halos lumineux parfois visibles de très loin (11).

 La pollution lumineuse de la ville de Toulouse, le 6 août 2010. © afp.com/REMY GABALDA

Quels sont les facteurs déterminants de la pollution lumineuse ?

1. L’utilisation d’installations d’éclairage peu performantes : De nombreux dispositifs ne concentrent pas la lumière sur la zone à éclairer, d’autres ne rabattent pas convenablement le rayonnement vers le sol. Il en résulte une perte directe d’énergie dont le rendement déplorable engendre également une mauvaise qualité d’éclairage en provoquant l’éblouissement des usagers (2).

Good and bad lighting fixtures © Cities at Night by Alejandro Sánchez de Miguel et al.

2. Des installations trop puissantes : il peut s’agir soit d’un trop grand nombre de points lumineux sur un secteur donné, soit de la puissance exagérée installée sur le dispositif. Ces situations sont fréquentes et se produisent pour des raisons diverses : arguments commerciaux, sensation de sécurité, recherche d’un certain esthétisme.

Le lampadaire « boule », où comment gaspiller 60 % de l’éclairage qui n’est pas dirigé vers le sol ! © A. Le Gué, ANPCEN

3. Une durée de fonctionnement supérieure aux besoins réels.

On voit régulièrement l’éclairage public dans des zones résidentielles éclairées à forte puissance à des heures tardives dans la nuit quand il n’y a plus de passage. La même chose est observée dans des zones commerciales ou des zonings industriels désertés de toute activité économique pendant la nuit.

4. Les types de lumière

La lumière est une onde électromagnétique, caractérisée par une distribution spectrale (9) perçue comme une couleur. Des études scientifiques menées sur les impacts sur l’environnement (humain, animal, végétal) de différents spectres lumineux mettent en évidence que certains spectres ont des effets pénalisant sur le vivant et la santé humaine (ex. troubles du sommeil, problèmes de vue, …). En ce sens, les types de lumière sont de plus en plus pris en compte comme un paramètre de la pollution lumineuse.

Que sait-on des impacts de la pollution lumineuse sur l’environnement, la santé ?

De nombreux scientifiques travaillent pour attirer l’attention des pouvoirs publics sur les impacts néfastes de cette pollution sur la santé mais aussi sur l’environnement (faune, flore, écosystèmes) (4).

  1. Chez l’être humain, la pollution lumineuse est suspectée d’altérer le système hormonal et la sécrétion de la mélatonine qui affecte le sommeil, le vieillissement et favoriserait développement de tumeurs. Chez les animaux – comme chez l’homme – la pollution lumineuse peut affecter rythmes biologiques, activités nocturnes, migrations, …. Quant aux spectres lumineux, des études suggèrent qu’au fil du temps, une exposition à la partie bleue du spectre de lumière (ex : téléviseurs, ordinateurs, ordinateurs portatifs, téléphones intelligents, tablettes) est susceptible de causer des dommages à long terme comme par exemple des dommages à la rétine et contribuer à la dégénérescence maculaire liée à l’âge qui peut entraîner la cécité. La couleur perçue d’une source lumineuse résulte d’une somme d’émissions à différentes longueurs d’ondes. C’est la composante dominante qui est perçue par l’œil humain. Il est bon de noter que la sensibilité des yeux d’autres espèces vivantes est différente de la nôtre. Dès lors ce qui peut être considéré comme bon ou acceptable pour l’homme ne l’est pas nécessairement pour l’animal.
Les longueurs d’ondes sont mesurées en nanomètres (nm). Un nanomètre est égal à un milliardième de mètre. DMLA* : Dégénérescence maculaire liée à l’âge (8) (Source)

Des solutions d’éclairage nocturne à compositions spectrales émettant dans les longueurs d’ondes vertes ou rouges moins nocives pour l’homme et qui – tout en restant parfaitement visibles pour l’Homme – s’accompagnent d’une moindre perturbation de l’environnement, de la faune nocturne comme du cycle du sommeil (10) commencent à être développées et testées.

A titre d’exemple, les chercheurs ont identifié la composante bleue de la lumière blanche comme étant celle qui donne le signal du réveil le matin ; par contre pour le repos il faudrait privilégier une lumière douce et chaude à dominante rouge, propice à l’endormissement (13). Les hormones de la « satiété » sont stimulées par la présence des couleurs vert et bleu le matin – après une nuit « courte », l’exposition à la lumière verte ou bleue augmenterait la concentration de leptine réduisant le signal de « faim ». La nuit, l’exposition à la lumière blanche, au rouge et au bleu augmente l’attention (ne pas confondre avec la performance!) et réduit la somnolence. L’après-midi seule la lumière rouge a un effet sur la réduction de la somnolence et l’augmentation de l’attention (12).

  1. D’un point de vue comportemental, la pollution lumineuse entraîne des réponses de type attraction/répulsion et orientation/désorientation. Certains animaux s’éloignent de la source de lumière et au contraire d’autres, en s’approchant des éclairages artificiels, peuvent entrer en collision avec les grandes structures éclairées, se déshydrater voire se brûler au contact des lampes et devenir des proies ce qui peut amener à une diminution des individus de certaines espèces (5).
  2. Elle réduit la visibilité du ciel nocturne et sur le plan économique, conduit à une dépense inutile quand la lumière produite est dirigée vers le ciel.

Quelles sont les initiatives liées à la lutte contre la pollution lumineuse 

Petit à petit, la communauté scientifique a attiré l’attention des pouvoirs publics sur les dangers de cette pollution et une prise de conscience s’est faite. Elle se traduit par des mesures concrètes voire contraignantes à des échelles plus ou moins grandes. Ainsi des communes signent des chartes d’éclairage durable, des règlementations visant les éclairages des bâtiments commencent à être mis en place. Des décrets sont pris pour règlementer l’utilisation des éclairages dans différents espaces.

Sur base de recherches récentes, de nouvelles normes sont établies pour guider les fabricants d’éléments d’éclairage. Des indications concernant les consommations sont également formulées via des études d’éclairages sur base des besoins réels. Des cahiers de charges pour le choix des luminaires et le recours à des technologies de systèmes de commande à distance d’appareils sont encouragés (6).

A cela s’ajoute aussi un important travail de sensibilisation et d’information de la population et d’autres catégories de publics sur la pollution lumineuse et les mesures à prendre pour limiter ses impacts.

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