Prise en compte de la faune dans la nouvelle stratégie d’éclairement du réseau routier régional

Par Thierry Kervyn (Attaché qualifié, SPW Agriculture, Ressources naturelles, Environnement) et Denis Cornet (Directeur, SPW Infrastructures Mobilité)

Les astronautes à bord de l’ISS reconnaissent facilement la Belgique, tant la lueur générée par le réseau routier est importante… L’avènement des LED, un éclairage nettement plus efficient, a conduit le Gouvernement wallon à entamer la révision de l’éclairage nocturne de l’entièreté du réseau routier régional (routes et autoroutes de Wallonie gérées par la SOFICO ou le Service public wallon Mobilité infrastructures). La décision a été prise de remplacer l’éclairage existant par des LED et d’en assurer la maintenance au travers d’un vaste marché public d’une durée de 20 ans. L’adjudicataire de ce marché, le groupement LuWa, s’engage à éclairer juste, au bon moment et au bon endroit.
Photo prise par Thomas Pesquet, en 2017, depuis l’ISS à 400 km d’altitude. Devinez où se trouve Paris, Londres, Bruxelles et Namur…

Eclairement sans dispersion

Le nouvel équipement présente des luminaires dont l’indice ULOR est de zéro et un éclairage directif : cela permet d’éclairer uniquement la route et pas le bas-côté ni les arbres.

Optimisation de l’éclairement par dimmage

L’optimisation des économies d’énergie est réalisée grâce à l’adaptation de l’éclairage au trafic, tant par rapport au trafic moyen sur les grands axes que par rapport à la présence effective de véhicules sur les bretelles d’accès.

Régime de dimmage du dimanche au jeudi, avec un exemple d’allumage de l’éclairage public du dimanche au jeudi, de 18h à 7h du matin

Le groupement LuWa installe sur l’ensemble des passages piétons du réseau structurant de Wallonie des capteurs de présence positionnés sur les supports d’éclairage public de part et d’autre de la chaussée. Ceux-ci permettent de remonter à 100% le niveau d’éclairage des passages piétons lorsqu’un passant souhaite traverser. De même, l’éclairement est adapté aux situations particulières : conditions météorologiques difficiles, travaux, accident. A contrario, pour les bretelles d’autoroutes ou les aires de parking, en l’absence de véhicule, l’éclairement sur les voies reste fortement diminué.

Evaluation appropriée des incidences

Comme ce projet est susceptible d’impacter le patrimoine naturel hébergé dans les sites Natura 2000, et conformément à la Directive Habitats, ce projet a bénéficié d’une évaluation appropriée des incidences sur le réseau Natura 2000.

Température de couleur et distribution spectrale

Un compromis satisfaisant est pris entre l’impact de la température de couleur sur la consommation des LED et sur les capacités de perception humaines. En effet, l’œil humain distingue mieux les détails et évalue mieux les distances avec une lumière blanche « froide » qu’avec une lumière « chaude », mais la faune est moins sensibles à des couleurs « chaudes » que « froides » : en choisissant une température de couleur qui donne une lumière blanche « neutre », le meilleur compromis entre sécurité et adéquation pour l’environnement a été recherché. Autre point important, la consommation énergétique des LED est plus importante avec les couleurs chaudes : en passant d’une température de référence de 4000 K à 3200 K, la performance énergétique est diminuée de 16 %. La consommation d’énergie du réseau structurant en est alors impactée. C’est pourquoi un éclairement chaud de 2800 K est réservé aux zones de très forte sensibilité pour la biodiversité.

Pour tous les luminaires du réseau structurant situés à moins de 50 m de sites Natura 2000, de sites à statut de protection en vertu de la Loi sur la conservation de la nature LCN, de SGIB, et de passages aériens pour le gibier, les luminaires auront une température de couleur de 2800 K.

Dans les zones où la température de couleur est moins critique pour la faune, des luminaires à 4000 K seront couplés à une stratégie de dimmage personnalisée sur la zone.

Echelle de couleur de la lumière entre 800 K et 12.200 K pour un observateur (© Bhutajata)

Evitement : suppression de l’éclairage aux périodes sensibles

L’ensemble des luminaires dispose d’un équipement qui permet de dimmer l’éclairage avec une précision au point lumineux. Selon les recommandations de l’étude d’incidences, et en accord avec la SOFICO et le centre PEREX pour valider que cela ne met pas en danger la sécurité des usagers, l’éclairage est totalement coupé, sauf circonstances exceptionnelles (notamment météorologiques) :

  • dans les zones sensibles (moins de 50 m des zones Natura 2000 et sites particuliers), extinction dès 22h entre le 1er avril et le 31 octobre.
  • pour les zones abritant la barbastelle, également active en hiver, extinction dès 22h toute l’année. Ce réglage fin de l’extinction permettra de concilier au mieux les exigences de protection de la faune et de sécurité.

Communication sur l’ensemble des mesures précédentes

Les utilisateurs du réseau structurant sont d’autant plus compréhensifs des démarches particulières engagées que ces démarches leur sont expliquées de manière pédagogique. Le Groupement LuWa propose de communiquer sur les mesures de protection de la faune et de la flore de plusieurs manières :

  • à l’entrée des zones concernées par ces mesures, avec des panneaux adaptés au type de route
  • sur le site internet de la SOFICO
  • dans les aires connectées mises en place par le Groupement LuWa sur des aires de covoiturage, via les panneaux à message variable.

De plus, les comités utilisateurs mis en place par le Groupement LuWa seront l’occasion de discuter de ces mesures de réduction de la pollution lumineuse, et pourront être ajustées en fonction du ressenti des utilisateurs : ajout de zones, remontée du niveau d’éclairage dans un virage considéré comme anxiogène, etc.

L’éclairage du réseau routier régional passe au LED. C’est l’occasion de le moduler pour restreindre son impact pour la faune.

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